IV Les secteurs APEF sous l’angle du genre

4.2. L’entrée des hommes dans les secteurs APEF: un enjeu?

Pourquoi favoriser la mixité dans les secteurs féminisés?

La répartition segmentée des hommes et des femmes sur le marché du travail est souvent associée à des représentations sur les métiers et les secteurs. Certains métiers impliqueraient des compétences dites « masculines » et d’autres des compétences dites « féminines », ce qui entretiendrait des rapports sociaux de sexe spécifiques (Buscatto & Fusulier, 2013). Dès lors, il apparaît opportun d’encourager la mixité dans les secteurs fortement féminisés ou masculinisés. Cette mixité participerait à déconstruire progressivement les stéréotypes genrés encore fortement prégnants dans nos sociétés. L’enjeu est particulièrement mis en avant pour le secteur de la petite enfance. Le fait que les enfants sont, dès leur plus jeune âge, pris en charge par une majorité de femmes dans leurs premiers lieux d’éducation participe à entretenir les stéréotypes sexuels de génération en génération (Coudert, 2011). Parallèlement, cela ne favorise pas l’entrée des hommes dans le secteur qui, « pour des raisons culturelles et sociétales », n’affirment pas volontiers vouloir travailler avec de très jeunes enfants (Coudert, 2011). En 1992, le Conseil des Ministres de l’Union Européenne avait émis un objectif de 20% d’hommes parmi le personnel du secteur de la petite enfance en 2006.

On est actuellement très loin du compte : la Norvège aurait le score le plus élevé d’Europe avec 9% d’hommes dans ce secteur (Coudert, 2011). Ces réflexions sont également valables pour les autres secteurs fortement féminisés tels ceux que nous étudions dans le présent rapport.

Etre attentif à la persistance de la segmentation verticale

Un constat s’impose : même dans les secteurs « féminisés », les hommes bénéficient d’un « escalator de verre »: « leur progression de carrière tend, en moyenne, à être plus favorable que celle de leurs collègues femmes. Ils accèdent aussi plus souvent qu’elles à des positions d’autorité » (Buscatto & Fusulier, 2013). Nous n’avons pas les informations suffisantes pour attester de cette tendance dans les secteurs APEF. On peut faire l’hypothèse, à partir de la variable rémunération, que cette tendance est partiellement vérifiée. En effet, si les hommes atteignent plus fréquemment des salaires élevés (souvent associés à des postes de direction, même si l’absence de données chiffrées nous empêche de le vérifier), les femmes, elles, sont plus nombreuses à occuper des salaires intermédiaires (probablement associés à des fonctions dites « intermédiaires »). L’objectif de mixité associé à l’évitement de la segmentation verticale repose donc également sur la condition de revalorisation du statut et du prestige des professions du social par la formation et la qualification (Peeters, 2013).